Mis à jour le vendredi 9 juin 2023 by Philippe Serieys
Le quartier de Charonne, autrefois un village bucolique et tranquille à la périphérie de Paris, s’est métamorphosé au fil des siècles en une enclave unique et historique dans la métropole, conservant son charme de « village » parmi ses ruelles pavées et ses maisons basses, tout en intégrant le dynamisme de la vie urbaine parisienne
VINTAGE FRIDAY. Ah, le quartier de Charonne, cette petite pépite historique du 20ᵉ arrondissement de Paris ! Remontons plusieurs siècles en arrière. Charonne, dont le nom viendrait soit du mot gaulois « carn », signifiant « pierre », soit du latin « carrus », désignant un « char », était autrefois un village à la périphérie de Paris, marqué par l’agriculture, de vastes vignobles et des moulins à vent. Durant le Moyen Âge et jusqu’à la Renaissance, Charonne reste un hameau discret, son église Saint-Germain et ses maisons de paysans nichées dans la verdure faisant office de repères dans la campagne.
Le territoire de Charonne se composait alors du Grand-Charonne et du Petit-Charonne. Le Petit-Charonne était situé sur les deux côtés du chemin de Montreuil, alors que le Grand-Charonne s’étendait jusqu’à Saint-Fargeau et le Mont Louis, qui deviendra plus tard le cimetière du Père-Lachaise. Le quartier de la Réunion réunissait le Grand et le Petit Charonne. Au centre de ce territoire se trouvait le village de Charonne délimité par la Grande-Rue (actuelle rue de Bagnolet) et la rue St-Germain, devenue la rue St-Blaise, avec son Château et l’église Saint-Germain-de-Charonne qu’on peut encore voir aujourd’hui, avec son cimetière attenant, qui est l’un des derniers cimetières paroissiaux de Paris. Au 19ᵉ siècle, la Révolution Industrielle et l’expansion de Paris engloutissent progressivement les villages alentour. En 1860, Charonne est officiellement annexé à la ville de Paris et devient une partie du 20ᵉ arrondissement. Des usines s’installent dans le quartier, attirant une population ouvrière. Les vignobles disparaissent petit à petit, remplacés par des habitations.
Au 20ᵉ siècle, Charonne se transforme de nouveau. Comme un peu partout à Paris et en banlieue, les usines ferment, la population change, et le quartier devient un lieu prisé par les artistes et les intellectuels, notamment après la Seconde Guerre Mondiale. De nombreuses maisons de ville et ateliers d’artistes, ainsi que des bâtiments historiques comme l’église Saint-Germain, sont alors préservés du démantèlement. Aujourd’hui, malgré la métamorphose urbaine qui a transformé Charonne, ce quartier conserve une atmosphère unique et un esprit de « village » dans la grande métropole parisienne. On peut encore trouver des ruelles pavées, des passages couverts, des jardins cachés, et des maisons basses avec des jardins, qui rappellent que ce quartier était autrefois une campagne verdoyante. La mémoire du village de Charonne survit également dans des lieux comme la Rue Saint-Blaise et la villa Riberolle, impasse couverte de pavés et qui abrite d’anciens ateliers, datant du XIXe siècle où l’on peut encore ressentir cette atmosphère d’antan. Des bistrots traditionnels aux côtés de cafés modernes, des boutiques d’artisans aux côtés de galeries d’art contemporain, le quartier de Charonne est un mélange fascinant de l’ancien et du nouveau. Il est un exemple parfait de comment l’histoire et le progrès peuvent coexister dans une ville en constante évolution. Néanmoins, avec un peu de nostalgie qu’on ne peut s’empêcher de ressentir en regardant ce court reportage, on peut regretter l’ambiance rurale et la tranquillité bucolique qui caractérisaient jadis ce quartier. Il est difficile de ne pas se demander comment aurait été la vie dans ce petit village de Charonne, à une époque où Paris n’était qu’une lointaine silhouette sur l’horizon.
Un reportage du journal de Paris de l’ORTF du 9 novembre 1974 UN film INA