La Métropole du Grand Paris s’installe et affiche son transpartisanisme

Mis à jour le samedi 6 juin 2020 by Olivier Delahaye

Ce vendredi 22 janvier, la Métropole du Grand Paris siégeait pour la première fois et élisait son exécutif. Comme prévu l’assemblée des nouveaux conseillers s’est rangée unanimement derrière Patrick Ollier dans le but de poursuivre la construction d’une institution qui fait toujours débat.

« À midi ça devrait être bouclé », lançait un maire dans les couloirs de l’hémicycle du Conseil économique, social et environnemental (CESE). À midi dix-huit ça l’était. Un peu plus de trois heures seulement pour désigner par un vote à bulletin secret le premier président de la Métropole du Grand Paris et par un vote électronique l’armée mexicaine de ses adjoints : pas moins de 20 vice-présidents et 8 conseillers métropolitains délégués au bureau. Et ce, dans un hémicycle plein comme un œuf où siégeaient 205 conseillers métropolitains.

Ollier et ses alliés

Il faut dire qu’avant ce 22 janvier, jour qualifié d’historique par nombre de maires présents, les jeux étaient faits. Patrick Ollier (maire LR de Rueil-Malmaison) serait président et ses vice-présidents avaient déjà été désignés. Tout s’était décidé dans la semaine précédente par une suite de rencontres et de tractations. Le 21, Philippe Laurent (maire UDI de Sceaux) avait aussi jeté l’éponge dans un communiqué où il dénonçait pourtant « les tractations partisanes ». Le vote serait pour du beurre. D’un coin à l’autre de l’échiquier politique, on s’était rallié au maire de Rueil, le même qui avait manqué de peu la présidence de Paris Métropole en 2015. Et d’un coin à l’autre, on fit part de ses raisons.

Daniel Guiraud (PS) lançait ainsi à Patrick Ollier : « Ta capacité à présider la métropole s’impose comme une évidence. La métropole ne nous dépolitise pas mais nous savons qu’ici comme en d’autres lieux des logiques de coopération prennent le pas sur des logiques politiques. » Puis : « La Métropole du Grand Paris n’est pas aboutie, il faut perfectionner le système. » En d’autres termes, la construction de cette institution qui n’a encore ni adresse ni téléphone ne peut être que transpartisane – et nous aurons peut-être une idée de son achèvement lorsque reviendront les chamailleries, lorsque l’enjeu de pouvoir aura pris le pas sur l’enjeu institutionnel. Au Front de Gauche, Dominique Adenot dénonçait bien « une métropole inconnue, que les conseillers métropolitains n’ont pas voulu dans ces termes. » Mais : « Nous ne jouerons pas la politique de la chaise vide et avons décidé de participer aux élections des vice-présidents et du président Ollier. » Pour l’UDI, Laurent Laffont proclamait « adhérer à l’accord mis en place, voter Patrick Ollier et participer à l’exécutif. » Même son de cloche chez Marielle de Sarnez, pour le Modem : « Nous soutenons la candidature de Patrick Ollier qui aura une tâche ardue ». Enfin chez les Verts et Galla Bridier, ça donnait ça : « Au nom d’un accord, nous allons élire Patrick Ollier président de la Métropole. » Il l’a été. Par 192 voix sur 204 suffrages exprimés, soit une victoire à 94%. Une reconnaissance plus qu’une élection. Un besoin plus qu’un combat politique. Avec Patrick Ollier, c’est l’esprit de Paris Métropole qui souffle sur la MGP. Dans son allocution, Anne Hidalgo, désignée 1ère vice-présidente, vantait d’ailleurs les mérites « des visionnaires (Bertrand Delanoë et Pierre Mansat) et ceux des pionniers (Patrick Braouezec, Jacques JP Martin…) dont vous étiez et qui ont veillé sur le destin de cette Métropole. »

« Valérie Pécresse est une amie »

Car pour ses partisans, l’enjeu est d’abord de ne pas tout démolir. Les ennemis sont à la porte. Au moment même où siégeait le premier conseil métropolitain, Didier Bariani (LR) en charge du Grand Paris à la Région Île-de-France, fustigeait une Métropole qui « n’apparaît pas viable, son interaction avec la Région, les départements de petite couronne et les établissements publics territoriaux est plus que problématique. » Sa patronne, Valérie Pécresse n’avait pas hésité pas non plus en déclarant que « la droite (revenue au pouvoir en 2017) devra s’engager à supprimer la Métropole du Grand Paris. » Plutôt en colère, Patrick Ollier y répondait en deux temps : « Ce qui se passe avec M. Bariani, très sincèrement ça ne m’intéresse pas », puis « Il n’y a pas de conflit avec la Région Île-de-France. Valérie Pécresse est une amie, nous avons déjà des idées pour travailler ensemble. » La nomination unanime de Patrick Ollier vaut lettre d’intention adressée aux contempteurs de la Métropole. Et le retrait de Philippe Laurent dans les derniers instants montre que la bataille se tient à l’extérieur plutôt qu’à l’intérieur. Patrick Ollier ne l’a-t-il pas remercié en ces termes : « Il a compris que pour commencer il valait mieux qu’on soit tous d’accord. »

Face à une Région qui affiche sans cesse ses divisions politiques (aujourd’hui sur la question du pass Navigo), la Métropole porte, elle, l’étendard du transpartisanisme. « Les citoyens attendent qu’on dépasse nos clivages pour travailler avec eux », a lancé Patrick Ollier. Tout en la jouant modeste : « La Région est majeure, nous sommes une assemblée de maires » (Patrick Ollier), le nouvel exécutif métropolitain vantait bel et bien ce 22 janvier un « OVNI institutionnel » selon les mots de Patrice Leclerc (maire PC de Gennevilliers), « un défi extraordinaire : construire quelque chose qui n’existe pas, qui se constitue à partir d’une gouvernance partagée » (P. Ollier), « une gouvernance innovante que nous avons été capable d’inventer » pour Anne Hidalgo qui y voit même un « signal fort et remarqué » lancé au monde dans la perspective d’une organisation des Jeux Olympiques et de l’Exposition universelle. Pour une Métropole qui n’existe que sur le papier et dont le budget de 73 M€ équivaut à 1,8% de celui de la région, ce genre de grand projet est bienvenu. Gilles Carrez, battu par Patrick Ollier à la candidature LR pour la présidence et devenu 2e adjoint en charge des Finances, voit d’ailleurs dans les JO « un projet identifié pour la Métropole ».

Grands projets, gouvernance innovante, union territoriale, la Métropole s’est installée, elle doit dorénavant exister… en marquant sa différence.

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