Mis à jour le mardi 23 juin 2020 by Olivier Delahaye
ANALYSE. Dans une note rapide publiée hier, l’Institut d’aménagement et d’urbanisme d’Île-de-France fait un point complet sur la création de la Métropole du Grand Paris : sa définition, ses compétences et… ses questions. Un décryptage salutaire.
En ce qui concerne la définition, c’est encore assez simple : la Métropole du Grand Paris (MGP) est un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre (EPCI), dont le périmètre de compétences englobera au 1er janvier 2016 Paris et les 3 départements de petite couronne, soit 124 communes. Quatre autres communes, situées dans les départements limitrophes, mais appartenant à des EPCI dont le siège est situé en première couronne, pourront décider d’y adhérer avant le 30 septembre 2014. Et 43 autres communes limitrophes sont susceptibles de venir s’y ajouter.
Le logement, d’abord et toujours
Pour ce qui est des compétences, on peut suivre. Il s’agira de : « l’aménagement de l’espace métropolitain, la politique locale de l’habitat, la politique de la ville, le développement et l’aménagement économique, social et culturel, et la protection et mise en valeur de l’environnement et de politique du cadre de vie. » Pas si simple que ça, toutefois quand on lit que « la MGP pourra créer, aménager et gérer des zones d’activité, certains équipements culturels, éducatifs et sportifs. » L’auteur fait bien de préciser ensuite : « Elle prendra nécessairement en compte les orientations définies par le conseil régional. » Oui, quand on connait les prérogatives de la Région en matière de développement économique, notamment, cela laisse supposer de sacrées passes d’armes entre les deux institutions.
En revanche, sur la politique du logement, on peut convenir qu’il s’agit d’une compétence cruciale « pour résorber durablement la crise du logement dans le cœur d’agglomération d’une région où sont produits seulement 36 000 logements par an, là où 70 000 seraient nécessaires. » Thierry Lajoie, président de l’AFTRP (bientôt Grand Paris Aménagement), ne disait-il pas dernièrement que « la Métropole du Grand Paris a été enfantée par le problème du logement »? Si la question du logement ne relevait pas de dynamiques parfois incompréhensibles et d’un marché soumis à spéculation, on pourrait même parier que cette simplification issue d’une véritable volonté politique va porter ses fruits.
Intérêt métropolitain
Restent les questions. La première se pose sur les prérogatives dévolues aux fameux territoires (en fait, de nouvelles intercommunalités) sous-administrant la métropole. Rappelons que des conseils représentatifs de territoires comptant au moins 300 000 habitants, agiront en tant que délégataires de la MGP. « Ne disposant pas de ressources fiscales propres, quelle sera l’adéquation entre les dynamiques sociales et territoriales de ces « sous-ensembles » et la dotation, dénommée « état spécial de territoire », qui leur sera allouée ? », questionne l’étude.
Plus compliquée encore, la question des compétences orphelines. Petit rappel : la plupart des communes de petite couronne (exceptées 42) appartiennent déjà à des intercommunalités. Celles-ci exercent certaines compétences qui n’entreront pas dans le cadre de celles dévolues à la MGP. Dans les deux ans suivant sa création, la Métropole devra choisir : prendre en charge ou non ces compétences. Si elle n’en veut pas, ces compétences retourneront à la commune. Mais que se passera-t-il dans le cas contraire? L’absorption fera-t-elle tâche d’huile? La prise en charge de ces compétences donnera-t-elle lieu à « une extension et une application des conditions d’exercice de cette compétence à l’ensemble du territoire métropolitain, en vertu de l’égalité des territoires ? Une telle éventualité, potentiellement porteuse d’une harmonisation des services, pourrait en effet dans le même temps avoir d’importantes conséquences, tant sur les conditions de l’organisation des services publics locaux que sur l’équilibre financier de la MGP. »
Enfin, la question qui fâche : les sous. Les intercommunalités existantes perçoivent des ressources issues de la fiscalité économique des communes, ressources « principalement affectées à la gestion de services urbains de proximité (voirie, espaces verts, propreté, déchets, média- thèques, piscines, etc.) ou à l’exercice de compétences communales a priori non métropolitaines. Dès le 1er janvier 2016, ces ressources seront redirigées vers la MGP. « Quel sera alors le partage entre métropole et bloc communal ? Tel est l’enjeu du pacte financier et fiscal qui règlera les relations entre la métropole et ses membres. Celui- ci devra poser les jalons de la montée en puissance des fonctions métropolitaines, tout en veillant tant à maintenir qu’à améliorer la qualité future des services de proximité », conclut l’étude.
On devine à ces lignes poindre une nouveauté : l’intérêt métropolitain. Pour qui? Pour quoi? Durant peu de temps, des hommes et des femmes vont devoir se pencher sur la question à travers la mission de préfiguration de la Métropole du Grand Paris (voir ci-dessous). On leur souhaite bien du courage.
Extrait : « La mission de préfiguration : quels travaux ? »
« Le gouvernement est habilité à prendre des mesures par voie d’ordonnances afin de préciser certains aspects techniques sur lesquels la loi est demeurée muette. Il en est ainsi des conditions juridiques et budgétaires de la création de la MGP, des règles relatives au fonctionnement des conseils de territoires et aux concours financiers de l’État à ce « méta-EPCI ». Pour accomplir ces travaux, la loi prévoit l’installation par décret d’une mission de préfiguration, de 2014 à 2016, composée d’un collège d’élus (les maires des 123 communes, le maire de Paris, les présidents des conseils géné- raux, le président du conseil régional et les présidents des EPCI de première couronne, deux députés et deux sénateurs) et d’un collège de partenaires socio-économiques. Elle réalisera une série de rapports dont, outre ceux énon- cés ci-dessus, la préparation du diagnostic préalable à l’élaboration du projet métropolitain, la définition de l’intérêt métropolitain et les conditions d’exercice des compétences auparavant confiées aux EPCI, les travaux pré- paratoires à la définition du périmètre des territoires et au pacte financier et fiscal. La mission sera coprésidée par le préfet de région et le président du syndicat d’élus locaux de Paris Métropole – qui fut parmi les premiers acteurs à s’emparer de la question de l’aggiornamento de la gouvernance métropolitaine en Île-de-France. »
Flora Brett-Visset, IAU idF