Nouveau Longchamp : construire vite un hippodrome plus ouvert

Crédit : Dominique Perrault Architecture

Mis à jour le vendredi 5 juin 2020 by Olivier Delahaye

Après s’être dévoilé en septembre 2015, le projet du nouvel hippodrome de Longchamp lançait officiellement ce 14 mars sa phase de construction. Son gestionnaire, France Galop, veut en faire un lieu emblématique qui dépasse le cadre hippique.

Longchamp abrite la plus grande course de galop du monde, celle qui attire le plus de parieurs sur la planète, suivie par un milliard de téléspectateurs, dans près de 50 pays. Le Prix de l’Arc de Triomphe, puisqu’il s’agit de lui, a depuis 2008 un sponsor unique : le Qatar qui a, dès la signature, doublé l’allocation de l’épreuve, de 2 M€ à 4 M€. En 2014, elle est même passée à 5 M€, faisant de l’Arc la course la plus rémunératrice, loin devant le derby d’Epsom et ses 1,7 M€. Les recettes du PMU tournent, elles, autour de 20 M€. Une manne pour son organisateur France Galop, par ailleurs gestionnaire de l’hippodrome de Longchamp. Mais depuis l’ouverture à la concurrence des jeux d’argent, les paris hippiques perdent du terrain. -0,9% en 2013 puis -4,1% en 2014. Et le chiffre des entrées ne cesse de s’éroder. L’Arc de Triomphe, avec ses 51 000 entrées en 2014, peut avoir le sourire, mais sa performance masque la désertification des champs de course, Longchamp comme les autres.

La promenade au bois

Ce dernier, hippodrome phare du galop français et pièce maîtresse du hippisme international, a donc opté pour une stratégie d’ouverture afin de reprendre du poil de la bête. Edouard de Rotschild, président de France Galop, l’affirme : « Notre mission est de réconcilier les courses avec la société civile. » L’hippodrome comme sortie du dimanche en familles ? C’est aussi ce que voit Dominique Perrault, l’architecte du nouveau bâtiment : « Un lieu très agréable au sens de la promenade au bois. »

Fini donc le vieux Longchamp, né sous le Second Empire puis réaménagé dans les années 1960, place au nouveau, démoli et reconstruit. Ou plutôt : ses tribunes. Sa piste de 2 400 m, avec sa montée, sa descente et son immense ligne droite, qui en font l’une des plus sélectives du monde est maintenue, tout comme deux de ses bâtiments les plus anciens. Le reste a déjà été démoli, soit quand même 11 hectares. Bouygues Bâtiment Île-de-France est à la manœuvre depuis septembre pour une « démolition douce », précise son président Bernard Mounier. Autrement dit : on ne dynamite pas, on abat progressivement pour mieux récupérer les matériaux qui entreront dans une économie circulaire. Le projet doit évidemment posséder des critères de développement durable, d’accessibilité, et répondre aux mutations numériques.

Lieu d’appui aux JO ?

Il doit aussi mieux s’insérer dans son environnement – le bois de Boulogne -, faire « couture » avec celui-ci, et proposer un ensemble paysager « très esthétique », selon les mots d’Edouard de Rotschild. Dominique Perrault a donc prévu un seul bloc de tribunes au lieu de plusieurs et un « concept de transparence qui n’offre ni devant ni derrière. » L’architecte considérant même que cet esprit d’ouverture du Nouveau Longchamp doit être non seulement paysager mais aussi social. Car pas question de dédier l’hippodrome aux seuls turfistes. Il doit s’agir d’un « lieu convivial où les gens ne viennent pas seulement pour voir des courses de chevaux ». Il pourrait même servir « de lieu d’appui aux JO de 2024, au cas où… », se dit Dominique Perrault.

Son modernisme peut-il suffire à attirer le chaland et à permettre la tenue de 50 réunions hippiques par an au lieu de 30 ? Le journaliste spécialisé Guy de la Brosse en doute : « On ne voit pas pourquoi le public viendrait au Bois de Boulogne, excepté deux ou trois après-midi par an, davantage dans un écrin moderne que dans des tribunes classiques comme à Auteuil ou Saint Cloud, voire Vincennes également à la recherche de turfistes in vivo mais avec des opérations de promotion plus attrayantes et ciblées. »

Chantier à marche forcée

Quoi qu’il en soit, la phase de démolition terminée, ce 14 mars commençait, avec la pose de la première pierre, la deuxième phase : le chantier de gros œuvre, dont l’aboutissement est prévu en fin d’année. Durant cette période, la création de maquettes numériques très poussées doit permettre d’avancer plus vite la finalisation des bâtiments en 2017. « Il s’agit de construire avant de construire », précise Bernard Mounier. De manière exceptionnelle pour un chantier de cette envergure, cinq grues seront montées, et 45 ingénieurs encadreront plus de 500 compagnons. La mobilisation de gros moyens pour une réalisation à marche forcée.

Car le temps est compté. France Galop veut son nouveau Longchamp au plus tard pour septembre 2017. Cette année, le Prix de l’Arc de Triomphe se tiendra sur l’hippodrome de Chantilly. Avec 30 000 spectateurs au maximum, quand Longchamp pourra en contenir 70 000… France Galop a pour cela mis 130 millions dans le projet. Mais devra sans doute se séparer de l’un des autres hippodromes qu’il détient. Peut-être Maisons-Laffitte…

Pose première hippodrome longchamp - Olivier Delahaye
Pose de la première pierre. De gauche à droite : Edouard de Rotschild, Bernard Mounier, Dominique Perrault

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