Mis à jour le samedi 13 décembre 2014 by Olivier Delahaye
REPORTAGE. Le Grand Paris se construit de nouveaux quartiers, l’Église catholique y prend place. Logements, bureaux, commerces, équipements… et lieux de culte. À la Plaine-Saint-Denis, une petite église s’est donc implanté : Saint-Paul-de-La-Plaine.
L’Église construit. Baptèmes, confirmations, mariages catholiques et fidèles sont pourtant en chute libre. Mais elle construit. Pas n’importe où. Elle s’est fait un dessein : le Grand Paris. Elle suit l’évolution des transports, les mutations sociales et urbaines, observe où se construisent les bureaux, où sont planifiés les logements. En 2001, elle avait investi le quartier d’affaires de La Défense avec Notre-Dame-de-Pentecôte, lieu de culte précurseur d’une véritable vague d’implantations stratégiques. En 2015, ce sera la Maison Ozanam, en plein cœur de la ZAC Clichy-Batignolles, en 2016, le Centre Teilhard-de-Chardin, à Saclay et le Centre ecclésial Saint-Colomban au Val d’Europe, trois des neuf grands projets menés par son bras armé bâtisseur, Les Chantiers du Cardinal, association créée en 1931 pour, déjà, évangéliser la banlieue parisienne.
Pour l’heure, elle vient d’inaugurer Saint-Paul-de-La-Plaine, une maison d’église. Soit une chapelle de 200 places associée à un espace de rencontres et à un lieu d’exposition. Sur un petit périmètre, certes : à peine 430 m2. Mais au cœur de La Plaine-Saint-Denis, sanctuaire des nouveaux cols blancs de la métropole.

À quelques encablures du nouveau cirque des gladiateurs, le Stade-de-France, et face aux « marchands du temple » du e-commerce, ventesprivees.com.
Pour s’y rendre, on peut traverser l’énorme chantier du campus Condorcet et constater la vaste mutation urbaine qui va des Magasins généraux d’Aubervilliers aux abords de la gare RER D du Stade de France…
… la présence concomitante de l’ancienne et de la nouvelle ville, maisons basses et entrepôts délabrés face aux immeubles modernes résidentialisés à outrance.
Un certain monumentalisme, symbolisé par l’incroyable bâtiment du groupe scolaire intercommunal Robert Doisneau ouvert en 2011, y prend place. Tout devient grand ici, tout devient Grand Paris.
Les reliquats de la banlieue ouvrière se rencontrent au détour d’impasses où l’entremêlement des fils téléphoniques forment un paysage de naguère.
Saint-Paul-de-La-Plaine y côtoie, à quelques centaines de mètres, une autre église…
Saint-Denis et Aubervilliers se construisent des repères urbains, une quantité de repères urbains. Saint-Paul, selon le vœu de son architecte Patrick Berger (en association avec Jacques Anziutti), veut être de ceux-là.
Guère imposante, Saint-Paul se fait pourtant remarquer. De devant…
… ou de derrière.
Mini château d’eau par devant, goutte d’eau par derrière. Sise rue de la Procession, sur un terrain cédé par la mairie de Saint-Denis…
Comme signe ostentatoire, une lourde croix que l’on peut voir depuis tout le carrefour…
… mais ni cloche ni clocher. « Ce genre de signe n’a plus de raison d’être », commente Patrick Berger. Pas d’iconographie non plus à l’intérieur. Plutôt l’épure. Douze sources lumineuses, évocation des apôtres.
« La liturgie d’une époque s’exprime par l’architecture de ses églises », selon l’architecte. Alors, ce sera transparence (les célébrations seront visibles de la rue)…

… dessin en grand huit – symbole de l’infini – jardin de fleurs blanches, et une acoustique travaillée par l’écho.
En passant à la Plaine-Saint-Denis il y a quelques années, le cardinal Lustiger avait dit : « Il va falloir qu’il y ait là une présence chrétienne. » Le projet, élaboré en 2002, s’est mis en chantier en 2012 pour une inauguration (pardon une consécration) le 24 mai dernier. Coût de l’opération : 2,7 millions d’euros, dont 1,7 million apporté par les Chantiers du Cardinal et 1 million par le diocèse de Saint-Denis.

Se défendant de tout prosélytisme, l’Église assume sa stratégie de s’implanter là où la ville se fait. « Cela a toujours été la mission de l’Église d’être présente là où les populations s’accroissent et où se sont créés de nouveaux lieux de vie et d’activités économiques », a expliqué à l’AFP l’évêque de Saint-Denis, Mgr Delannoy.
Elle prend ici place dans un quartier où convergent 50 000 salariés par jour, où se côtoient SFR, la SNCF, la Haute Autorité de Santé, la Cité du cinéma, Generali, Alstom, Paris 8, le CNAM, etc etc.