Seine-et-Marne : Télécentres de toutes les attentions

Buro'nomade à Val d'Europe, l'un des 8 télécentres accompagné par Initiatives Télécentres 77.

Mis à jour le jeudi 3 février 2022 by Olivier Delahaye

Bouger mieux avec le Grand Paris Express, c’est bien. Et si, parallèlement, nous bougions moins ? Une question à laquelle répond la Seine-et-Marne qui expérimente en défricheuse, télécentres et coworking.

L’idée surgit d’un constat simple. « La majorité des habitants de notre département passe plus de deux heures quotidiennes dans les transports. Pour aller, la plupart du temps, travailler devant un écran », résume Gérard Eude.

Réduire les trajets domicile-travail

Président d’Initiatives Télécentres 77, structure associative de télécentres et coworking en Seine-et-Marne, il est aussi en charge du développement économique et des grands projets d’aménagement au sein du département. Il connait donc bien ce territoire vaste (la moitié de l’Île-de-France), mi-rural mi-urbain, doté d’une vitalité démographique remarquable… mais dont les habitants sont souvent tributaires d’un emploi à Paris voire de l’autre côté de la capitale. Côté ouest.

Avec ce que cela suppose d’axes routiers (dont l’A4 et l’A6) congestionnés. Et des habitants de plus en plus excédés par les dysfonctionnements des RER E, D et A, la ligne la plus dense du réseau francilien et la plus fréquentée d’Europe. Agir sur les infrastructures est dès lors prioritaire ; et plusieurs grands chantiers, dont le Grand Paris Express, vont en ce sens.
Mais si l’on agissait à la source ? En diminuant voire supprimant ces trajets domicile-travail ? Qu’il se mesure à l’aune des émanations de CO2[1], du budget transport ou de la qualité de vie, le bilan serait sans conteste positif ; dans le sens du développement durable et de la transition énergétique.

Écologie, synergies, qualité de vie

La Seine-et-Marne s’investit depuis des années sur la question des trajets domicile-travail : covoiturage, meilleur maillage transports et plus récemment les télécentres.

« Il ne s’agit pas de calquer le modèle de San Francisco, qui attire essentiellement des ingénieurs et des indépendants ; plutôt adapter ce qui se fait à Amsterdam et sa banlieue qui compte déjà pas moins de 120 télécentres », commente Gérard Eude.

Le principe : un espace de travail partagé, sans charges locatives fixes, où chacun vient quand il veut et paie au temps passé et à l’utilisation des services.
Premiers intéressés : les employés de grandes entreprises ou de l’administration, les PME, TPE, créateurs d’entreprise, indépendants et commerciaux.

Chacun y trouve les fonctionnalités qu’il recherche : accès à internet très haut débit et sécurisé, accueil, postes de travail confidentiels ou en coworking (pour ceux qui souhaitent travailler en commun et partager), salles de réunion, services de visioconférence… Mêmes avantages dans les « espaces de coworking », sur des surfaces plus réduites (200 à 600 m²). Concrètement, les locaux s’articulent entre espaces de travail collaboratifs et individuels. Sans oublier la restauration, la cafétéria et l’espace détente ; ainsi que l’animation. Car c’est un autre enjeu des télécentres : favoriser les rencontres professionnelles, le « réseautage » et les synergies.

« Au-delà des indépendants et TPE, les entreprises commencent à être séduites par cette formule. Pour elles, le télétravail en tiers-lieu permet de réduire significativement la facture immobilière, augmenter la productivité, stimuler l’innovation et la créativité des salariés tout en générant du lien social. Sans oublier la redynamisation de certains territoires ruraux dotés de superbes cadres de vie mais économiquement enclavés », souligne Gérard Eude.

Polliniser l’idée

Avantages individuels, collectifs, économiques, environnementaux, sociaux, territoriaux… Les promesses liées au développement des tiers-lieux sont nombreuses.

Comment dès lors étendre ce concept ? C’est une des ambitions d’Initiatives Télécentres 77. Sa vocation : transformer l’innovation en réalité au plan départemental et régional, en fédérant les collectivités parties prenantes (dont les communautés d’agglomération), les créateurs de télécentres et les utilisateurs potentiels, pour créer une offre de tiers-lieux en réseau, répartis sur le département. Et témoigner de l’expérience à de nombreux colloques et événements, pour polliniser le concept et partager les expériences.

Initiatives Télécentres 77 a ainsi accompagné en deux ans la création de 8 télécentres et espaces de coworking, en réseau, amorçant un maillage du département, déjà doté de 275 postes de travail flexibles et partagés. Il s’agit de télécentres 1 000 m² en zone urbaine : Buro’nomade Val d’Europe, Stop & Work Fontainebleau, ou semi-urbaine tel que Nomade Office à Trilport, d’espaces de coworking (Digital Village à Roissy-en- Brie) ; deux espaces télécentres sont situés dans des pépinières, Hubstart Paris Région et Sénart ; et du premier espace de coworking ouvert à l’Université en France : Sandbox 212, à l’Université Paris-Est IFIS. Tous fonctionnent en réseau en se rassemblent au sein du « Club des Tiers-Lieux IT 77 » animé par Initiatives Télécentres 77 en vue de mutualiser des actions et de l’animation. Ils s’insèrent également dans la dynamique de développement des tiers-lieux en Île-de-France.

Carte du réseau de télécentres en Seine-et-Marne

SNCF Gares & Connexions et SNCF Développement, adhérents à Initiatives Télécentres 77, échangent actuellement sur la potentielle implantation de télécentres en gare ou proche gare dans le cadre du réseau de tiers-lieux ainsi formé en Seine-et-Marne.

Nouvelle panacée ?

« Nous sommes à la fois ambitieux et réalistes sur les télécentres, tempère Gérard Eude. Aussi prometteurs soient-ils, ils n’assurent pas à eux seuls la vitalité économique d’un département. Il faut d’abord être en mesure de proposer un accès numérique à la hauteur. Le fait que la Seine-et-Marne ait bénéficié d’un aménagement numérique ambitieux et pris une longueur d’avance sur l’équipement en très haut débit a permis d’accélérer l’idée. »

Quant au modèle économique, il reste encore à affiner. « Il y a enfin des évolutions culturelles et toujours des résistances au changement. Cela n’intéressera probablement qu’un pourcentage faible d’habitants au début, mais pourra avoir des conséquences immédiates et tangibles sur la fréquentation d’une ligne de RER ou d’un axe routier saturé. De fait, les économies sur les constructions d’infrastructures justifieraient à elles seules un plan ambitieux autour de cette nouvelle façon de travailler. La clé de la réussite passe par la création d’un réseau de télécentres urbains et ruraux multi-services. »

Les télécentres seine-et-marnais continueront donc à être encouragés. Notamment confronté à des problématiques de désertification médicale et d’éloignement de l’enseignement, le département entend ainsi capitaliser sur ses atouts dans la formation à distance ou les services liés à l’e-santé. « Ce n’est que le commencement d’un mouvement de fond, permis par l’évolution des usages du numérique, et qui rendra notre territoire plus accessible et attractif », conclut Gérard Eude.

Le réseau Initiatives Télécentres 77
Une étude menée en 2011 auprès de 27 grands entreprises franciliennes et de 180 TPE et indépendants seine-et-marnais a souligné leur intérêt pour le travail à distance en tiers-lieux. Après concertation d’acteurs publics et privés prêts à s’impliquer dans la création d’un réseau de télécentres, le Conseil général de Seine-et-Marne et Seine-et-Marne Développement ont impulsé en avril 2012 la création d’une association loi 1901 : Initiatives Télécentres 77. Elle s’appuie sur le réseau de 1 500 km de fibre optique déployé en Seine-et-Marne. Innovante, l’association rassemble dès l’origine 35 structures, acteurs publics et entreprises impliquées dans la création d’un réseau de télécentres. Comptant 51 adhérents début 2015, sa mission est de favoriser le développement d’un réseau de télécentres interopérables, en Seine-et-Marne et en Île-de-France.
Initiatives Télécentres 77 accompagne les porteurs de projet, collectivités ou acteurs privés, avec pour objectif d’assurer un maillage de tiers-lieux de qualité, très bien équipés (fibre optique) et aménagés (normes ERT ou ERP, ergonomie des postes de travail…), aptes à recevoir des télétravailleurs d’entreprises ou d’administrations, et des indépendants, TPE, créateurs d’activité…
Initiatives Télécentres 77 travaille de concert avec la Caisse des Dépôts, la Préfecture de région, la Région et la Fonderie pour la création d’un réseau de tiers-lieux en Ile-de-France.
plus d’infos : http://www.it77.fr

[1] Les études menées aux États-Unis et aux Pays-Bas montrent que l’impact énergétique d’un salarié qui travaille en télécentre est 7 à 8 fois inférieur à celui qui se déplace.

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