Voitures volantes : Blade Runner dans le Vexin

VoloCity de Volocopter
Le prototype VoloCity de Volocopter sera testé à l'aérodrome de Pontoise. Crédit : Volocopter

Mis à jour le lundi 29 novembre 2021 by Olivier Delahaye

Avec la création d’un AMI à dimension internationale, l’Île-de-France se positionne pour créer une filière dédiée à la mobilité aérienne urbaine et veut faire des JO 2024 une vitrine pour devenir un territoire pionnier. Les enjeux sont colossaux.

Objet : la mobilité aérienne urbaine
Enjeu : la structuration d’une filière francilienne
Opportunité : les JO 2024
Voilà en résumé le sujet du raout qui s’est tenu ce 30 septembre dans un hangar de l’aérodrome de Pontoise – Cormeilles-en-Vexin (Val-d’Oise) où se sont succédé à la tribune cinq personnalités : Valérie Pécresse, présidente de la région Île-de-France, Edward Arkwright, directeur général exécutif du groupe ADP, Catherine Guillouard, PDG du groupe RATP, Franck Margain, président de l’agence Choose Paris Region et Florian Reuter, PDG de Volocopter. Avec, clou du spectacle, la révélation du VoloCity, l’aéronef électrique et urbain de Volocopter.

250 projets dans le monde

Depuis quelque temps, les projets de véhicules urbains volants fleurissent un peu partout dans le monde. On connaît le CityAirbus développé par Airbus Helicopters et Siemens, le Lilium Jet du constructeur allemand Lilium, l’EHang 216 du développeur chinois de drones EHang, le Boeing Passenger Air Vehicle du constructeur aérospatial américain Boeing, et donc le VoloCity conçu par la société allemande Volocopter. On ne les connaît pas tous, mais Edward Arkwright avance le chiffre de 250 projets en cours. On ne les connaît pas tous, mais tous ont en commun d’être des véhicules électriques à décollage et atterrissage vertical pour le transport de passagers en milieu urbain. Tous cherchent à être le plus silencieux possible. Et tous veulent conquérir un marché qui pourrait s’annoncer très prometteur.

CityAirbus, le véhicule volant testé par Airbus Helicopters. Crédit : Airbus Helicopters

Face à Toulouse

La concurrence est internationale, mais aussi régionale. Capitale française de l’aéronautique et du spatial, Toulouse Métropole a rejoint en 2018 l’initiative Urban Air Mobility du Partenariat Européen d’Innovation sur les Villes et Communautés Intelligentes, soutenue par la Commission européenne, et entend bien devenir un territoire pionnier en la matière. De son côté, la région Île-de-France, par la voix de sa présidente, se dit dotée d’un écosystème aussi riche qui se compte en « 100 000 emplois et 1 400 PME sous-traitantes ». Pour Valérie Pécresse, pas de doute : « C’est en Île-de-France que s’invente l’aéronautique du futur. » Et elle a un plan : se servir des Jeux olympiques de 2024 comme d’une vitrine « afin de positionner l’Île-de-France comme une référence sur le marché mondial de la mobilité aérienne urbaine ». Avec des partenaires ancrés territorialement : le groupe ADP et la RATP. Et un autre, allemand, qui a prouvé ses compétences en la matière : Volocopter. Il sera le premier acteur industriel à tester son véhicule du futur (proche) en Île-de-France.

Tester les voitures volantes dans le périurbain

De son côté, Choose Paris Region, l’agence de promotion et d’attractivité internationale de la région Île-de-France, s’est vue dotée d’une mission : piloter un Appel à Manifestation d’Intérêt (AMI) international visant à fédérer l’écosystème francilien autour de grands groupes, PME, start-ups, laboratoires et universités. Les candidatures se sont ouvertes ce 1eroctobre sur le site reinventerairmobility. Le calendrier est serré : clôture le 13 novembre, annonce des lauréats le 18 décembre, expérimentations de 2021 à 2024, démonstration durant les JO et déploiement entre 2024 et 2030. Et un lieu a été défini : l’aérodrome de Pontoise – Cormeilles-en-Vexin, géré par ADP, en plein cœur du parc naturel régional du Vexin. Choisi pour sa configuration périurbaine à 35 km au nord de Paris et qui va devoir subir quelques aménagements en matière de sécurisation, d’accueil de systèmes de recharge électrique ou de zones de stationnement pour servir de site testeur.

Nouvelle frontière

« La basse altitude est la nouvelle frontière de l’aviation », selon Edward Arkwright. Aujourd’hui, elle se peuple de drones. Demain, il est question qu’un flic comme Rick Deckard puisse traquer des réplicants à bord d’une voiture volante. Par exemple. C’est en tout cas ce que faisait Harrison Ford dans Blade Runner(1982) dont l’action se situait… en 2019. Au lieu du Los Angeles nocturne, sale et pluvieux du film de Ridley Scott, les promoteurs de la voiture volante imaginent plutôt des villes connectées, durables et radieuses où celle-ci pourrait servir à « désenclaver certains territoires », comme l’espère Catherine Guillouard, être un recours aux ambulances pour l’urgence sanitaire, transporter des touristes ou des hommes d’affaires, apporter une solution à la logistique du dernier kilomètre, voire devenir un nouveau point de maillage des transports publics, ce que Catherine Guillouard nomme même « le chaînon manquant » dans son rôle d’ensemblier des transports urbains. La Société du Grand Paris va-t-elle déjà devoir repenser les abords des gares de son Grand Paris Express pour prévoir une correspondance volante au-dessus des parkings à vélo ? La PDG de la RATP le dit tout de go : à son arrivée à la tête de l’opérateur, elle avait demandé à ses équipes d’inventorier les toits plats des emprises RATP, comme futures zones de décollage et d’atterrissage des véhicules volants : ce que l’on nomme déjà les vertiports.

La voiture volante, partie intégrante de l’imaginaire de Blade Runner.

Un marché à 35 milliards d’euros

Alors que trottinettes, vélos, voitures, scooters et piétons se disputent l’espace public, la voiture volante va-t-elle le décongestionner ou remodeler les structures urbaines ? C’est l’un des enjeux. Qui sont multiples. Enjeux technologiques autour du véhicule lui-même pour les constructeurs et les équipementiers. Enjeux en matière d’infrastructures pour les vertiports, mais aussi pour les énergéticiens tant la question se pose de la soutenabilité énergétique des systèmes urbains à l’heure du tout électrique. Enjeux en matière d’acceptation sociale et de réglementation. Enjeux aussi pour l’aviation commerciale puisque les technologies développées pourraient servir à sa « décarbonation », dorénavant actée pour 2035. À cette date, Catherine Guillouard estime que « la mobilité urbaine aérienne représentera un marché de 35 milliards d’euros, dont 8 milliards en Europe. » De quoi, effectivement, chercher à composer une filière au sein de la première région économique européenne.

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